Des pénitentes forcées…

D’après les « Titres de l’établissement de la maison de force appellée des recluses, située à Lyon, rue St Jacques au quartier de la place Loüis Le Grand », en 1630 et de l’agrément du Cardinal Alphonse-Louis du Plessis de Richelieu, alors Archevêque de Lyon, sont mises en place des « conférences » sur le choix des bonnes œuvres pour «… la gloire de Dieu et l’utilité de leur prochain ».

« Entre les bonnes œuvres auxquelles cette Compagnie étoit continuellement appliquée, rien n’apparut plus digne de ses soins que d’empêcher la corruption de la jeunesse en faisant enfermer de l’ordre de Monseigneur le Gouverneur les femmes & filles d’une prostitution publique, qui étoient pour lors répanduës dans la Ville & qui s’offroient ouvertement jusques dans les Églises ».

Sous l’autorité de Camille de Neuville de Villeroy, Archevêque de Lyon, une maison est alors louée dans un « quartier reculé » pour «… enfermer les premières coureuses qui furent arrêtées, auxquelles on donna le nom de Pénitentes, par rapport à la vie austère & frugale qu’on leur faisait mener ». Pour en renforcer la sécurité, la maison est achetée en octobre 1656, « … avec un grand jardin en dépendance isolée entre quatre ruës ».

…aux pénitentes repenties

Il semble qu’on ne badine pas avec les mœurs en cette époque. En effet, « … des particuliers mécontents de la conduite de leurs filles ou de leurs parentes qui s’étoient mal comportées, les firent enfermer dans la Maison des Pénitentes, moyennant la pension qu’ils payoient pour leur nourriture… ». Mais le mélange des filles de famille, même quelque peu dévergondées, avec les « … coureuses et les prostituantes… » est vite considéré comme inconvenant. Des maisons sont alors construites au fond du jardin, pour accueillir les pénitentes repenties et les séparer des pénitentes forcées. Les deux maisons sont confiées en partie aux religieuses de Sainte Marie du quartier de la Place de Loüis Le Grand et sous une même administration. C’est aussi à cette époque, notamment devant l’augmentation de la fréquentation des lieux, qu’une petite église est créée, séparant physiquement les deux maisons, dédiée évidemment à Marie Madeleine.

En 1702 on décide de soustraire l’administration des pénitentes repenties de celle des pénitentes forcées. La maison de ces dernières devient alors Maison de Force ou de Recluses.

Les dénominations Maison des Pénitentes Repenties (maison des repentantes) et Maison des Recluses sont finalement attestées par lettres patentes du Roy en 1710, fixant notamment les règles et répartitions des subsides et contributions accordés par la Ville, les recteurs de l’Aumône Générale et les recteurs du Grand Hôtel-Dieu pour chaque recluse (ainsi que pour les sept sœurs et la fervante préposées à l’entretien).

De prison…

En 1793 la terreur règne aussi, et peut-être surtout, à Lyon. La Convention fait arrêter les gens par centaines et les exécutions en masse ont lieu place des Terreaux et dans la plaine des Brotteaux. Mais les bourreaux ne suivent pas le rythme effréné des arrestations. Il faut donc enfermer les gens en attendant de s’en débarrasser (dans le Rhône, bien souvent). Les caves de l’Hôtel de Ville ne suffisent pas, les couvents, vidés des religieux chassés, sont donc utilisés et notre Maison des Recluses devient la prison des Recluses. La prison de la révolution se transforme en prison militaire.

En 1803 la construction de l’église St François est commencée, prenant place sur une partie des terrains des pénitentes (travaux achevés en 1847). En 1816 c’est la place St François qui est créée sur l’emplacement de la prison militaire. Elle deviendra en 1959 la place Charles Marie Widor (1844-1937) en mémoire du célèbre organiste qui commença à la suite de son père en l’église St François et joua à St Sulpice à Paris jusqu’à l’âge de 90 ans.

…en groupe scolaire

Que sont devenus les bâtiments des Recluses au cours du XIXème siècle ? Il semblerait qu’ils aient été occupés en plus de la prison militaire par le Conseil de Guerre. Le 02 mars 1925, les locaux alors vacants sont destinés à la création d’un groupe scolaire par le conseil municipal.

La maternelle regroupe alors 50 élèves en trois classes. On y entre par la place St François. L’école primaire, dont l’entrée est au 37 rue Sala, accueille, elle, trois classes pour 48 garçons. Le 25 juillet 1927, le conseil municipal accorde le nom de Michelet au groupe scolaire.